Programme Élysée Prim : ascension périlleuse !

Je vous avais déjà raconté le déroulement « administratif » de la montée du dossier de candidature au Programme Élysée Prim. Mais finalement, tout cela n’est que de la théorie, votre dossier ne gravit pas tranquillement toutes les étapes. En réalité, si vous ne vous armez pas de vigilance, vous risquez de ne jamais partir… Récit des coulisses d’une ascension risquée.

Le plus difficile n’a pas été de remplir le dossier. Remplir des renseignements administratifs, je sais faire ; parler de mes motivations par rapport à l’Allemagne, je sais faire aussi – en tout cas, j’essaye de le faire avec conviction. Quant à mes trois voeux géographiques, trop facile : Berlin en numéro 1, et puis pour le 3 faisant office de 2, ça sera « Tout Land« . Si j’avais pu écrire « envoyez-moi où vous voulez, pourvu que je puisse participer à l’échange l’année prochaine », je l’aurais fait.

La première difficulté a surgi quand j’ai dû envoyer le dossier.
Je suis brigade, quelle est le parcours de ma voie hiérarchique ? Directeur d’école certes, mais ensuite, à quelle inspection est-ce que je m’adresse ? Celle de mon école ? D’accord, mais je suis à cheval sur trois écoles, et deux circonscriptions différentes, comment est-ce que je fais ? Ah, flash info de dernière minute : on m’annonce une nouvelle affectation surprise pour après les vacances de la Toussaint, je change deux de mes écoles contre… ah tiens, c’est drôle, les informations vont plus vite pour m’arracher à mes élèves que pour me donner le nom de la (ou des) nouvelle(s) école(s). Je le saurai plus tard. Oui, enfin plus tard, ça sera trop tard pour mon dossier. Alors comme « là-haut », personne ne semble être en mesure de pouvoir répondre à mes questions, je décide de faire passer le dossier par l’école où je suis sûre de rester après les vacances. Même si je sais que mon remplacement doit s’y terminer en décembre. J’aurai le temps d’ici-là d’anticiper les épisodes suivants. Voilà mon dossier signé, et envoyé (en lettre recommandée avec accusé de réception) à ma demi-inspection de ma première moitié d’année.

Les jours passent, et l’accusé de réception ne revient pas. Pire, j’apprends grâce au suivi sur internet que mon courrier a été présenté à l’inspection. Mais refusé. Donc retourné au bureau de poste du secteur. Puis représenté. Mais refusé, une seconde fois. Et donc retourné au bureau de poste pour la durée réglementaire au cours de laquelle il ne peut rien faire, si ce n’est attendre son destinataire. Qui ne vient pas le chercher dans le délai qui lui est imparti. Alors que, pendant ce temps, la date butoir d’envoi des dossiers par les inspecteurs au DASEN est dépassée. Mon dossier, avant même d’avoir été étudié, est bloqué dans son ascension. Étant donné qu’il est de toute façon trop tard, je tente le tout pour le tout : le mail à l’inspecteur.
Je fais simple : je n’ai toujours pas de nouvelles de mon dossier de candidature pour le programme d’échange franco-allemand des enseignants du premier degré, envoyé à telle date en LR/AR ; je m’inquiète car la date limite de transmission au DASEN est dépassée. Le tout enrobé des formules de politesse bien sûr. Et là, le miracle se produit : le jour-même, l’inspecteur lui-même m’écrit, en réponse à une cascade de transferts/réponses au sein de l’inspection se dédouanant de la responsabilité de la non-réception du dossier. Sa réponse est aussi inattendue qu’efficace : il n’a manifestement pas eu connaissance du dossier, il en est désolé, et s’engage en contre-partie à le transmettre personnellement au DASEN en lui expliquant que le retard lui est entièrement imputable. À condition que je vienne lui déposer le lendemain un double du dossier. Avec les formules de courtoisie qui vont avec, bien évidemment. Je suis soulagée. Mon dossier va pouvoir être étudié comme tous les autres par le DASEN. Et je flaire même un avis favorable de l’inspecteur, qui ne pourra jouer qu’en ma faveur pour la suite de la candidature.

J’apprendrai bien longtemps après (en étant déjà en poste en Allemagne) qu’effectivement, l’inspecteur a appuyé mon dossier d’une mention « avis favorable ». Mais pendant longtemps, j’ai craint d’avoir en réalité obtenu un « avis défavorable », et qu’en réalité, son geste héroïque d’envoi du dossier n’était qu’une façade. Pardon Monsieur l’Inspecteur si vous me lisez, mais j’avais toutes les raisons de croire à ce scénario : les jours passaient, et aucune nouvelle de ma candidature. Je voyais approcher la date de la prochaine étape (l’entretien) et, au lieu de stresser pour son déroulement, je me faisais de plus en plus de souci quant au fait de savoir si j’allais y être convoquée. En plus de l’enjeu de la convocation, qui marquerait un pas de plus dans ma candidature, approchait dangereusement l’étape de l’autorisation d’absence pour l’entretien, qui était programmé un mardi après-midi… d’un jour de grève. J’ai commencé à mener l’enquête  et j’ai fini par obtenir le numéro d’une dame de la Division des Écoles, qui était responsable des échanges avec l’étranger. Je lui ai téléphoné dans un premier temps, en vain. Puis je lui ai laissé des messages vocaux, restés sans réponse. Puis écrit des mails, sans retour de sa part. La veille du jour J, toujours pas de nouvelles, mais dans un élan de lucidité, j’ai rempli ma demande d’autorisation d’absence pour le lendemain après-midi. En ayant conscience qu’elle pourrait être prise pour une grosse blague : je n’avais aucun justificatif pour accompagner ma demande, et je demandais à m’absenter un jour de grève, au sein d’une école où 90% des enseignant(e)s étaient grévistes.
Encore une fois, le miracle s’est produit : lundi soir, à 19h bien passé, je reçois un appel de la Division des Écoles. La dame au bout du fil – celle que je cherchais à joindre depuis une semaine – m’annonce avec le plus grand calme, sans mention aucune de toutes mes tentatives pour la joindre, que j’étais attendue le lendemain après-midi à telle heure pour un entretien concernant l’échange franco-allemand. Je saisis l’occasion pour lui demander une convocation en guise de justificatif pour ma demande d’autorisation. Elle note, et m’assure que dès le lendemain, celle-ci me sera envoyée par mail.

Finalement, l’étape de l’entretien n’était rien à côté de toutes ces péripéties !
Pour la petite histoire, malgré mes nombreuses relances, j’attends encore la convocation papier à mon entretien.
Et pour la petite histoire de la petite histoire, ma demande d’autorisation d’absence n’a jamais été transmise à l’inspection… Comprendra qui pourra, en tout cas, moi, ça me fait bien rire !

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