Bien avant de devenir maîtresse, j’avais déjà une sorte d’horloge interne qui pouvait m’indiquer sans calendrier quel jour on était. Je me souviens encore très bien qu’au collège, à peine le réveil éteint, je savais quel jour on était. Car à chaque jour de la semaine, sa sensation. Imperceptible, inexplicable et insaisissable, mais la saveur était bien là. Et le calendrier ne m’a jamais donné tort.
Bien évidemment, depuis que j’enseigne, cette sensation n’a fait que s’aggraver (ou s’accroître – je ne pense pas qu’il s’agisse là d’une grave maladie). Quel que soit le moment de la journée, impossible d’ignorer quel jour on est, tellement les semaines défilent invariablement au même rythme.

Pour cette année, je craignais une sensation de décalage horaire pour le mercredi. Ici, le mercredi n’est pas cette journée à la saveur si particulière. En ce qui me concerne, il s’agit même pour moi de la journée la plus chargée cette année : cours le matin dans mon école principale, puis AG de Français l’après-midi dans la seconde, c’est ma « grosse journée ». Mais malgré ce piège tendu à mon horloge interne, cette dernière ne faillit pas, la sensation du mercredi demeure.
Il faut dire que le rythme allemand m’aide un peu. Rien que dans le nom des jours, le mercredi est à part : alors que tous ses confrères terminent par « …tag » (« le jour de … »), Mittwoch (mercredi) dépareille. Littéralement, c’est le milieu de la semaine. Et les Allemands ne sont pas insensibles à cette nuance : à partir de Mittwoch, c’est le moment où l’on se dit que la grosse moitié de sa semaine de travail est désormais derrière soi, où l’on commencer à songer à ses plans pour le week-end, et c’est souvent une soirée propice aux petites sorties de détente. C’est ainsi que bien souvent, je me retrouve le mercredi soir au Biergarten (ou au bar lorsque la saison du plein air n’a pas encore pointé le bout de son nez) avec mes coloc’s, que nous faisons le point sur le début de la semaine (une sorte de météo du moral et de l’état de forme à mi-parcours), que l’on commence à se demander mutuellement : « Was hast du am Wochenende vor? » (« Qu’est-ce que tu as prévu pour le week-end ? »), et que l’on rentre chez nous prêts à affronter la deuxième (petite) moitié de la semaine.
Et tout en profitant de ce moment fort sympathique, je constate, amusée, que le mercredi a définitivement une saveur particulière : celle de la bière.

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