Les Canailles : opération séduction

Certaines photos de l’article sont celles de Canaillette 🙂
Si vous avez déjà voyagé, je suis sûre que vous avez rencontré au moins une fois Monsieur et Madame Franchouillard, ce couple de Français dont on a honte à l’étranger. Vous savez, celui qui a le talent de se faire remarquer au restaurant parce qu’il s’attend à être compris en français quel que soit le pays où il se rend, qui ne s’est manifestement pas renseigné sur les us et coutumes du pays, et qui tentera de vous prendre comme témoin pour régler son différend avec le serveur – serveur qui se sera pourtant plié en quatre pendant tout le repas pour s’adapter à la langue et aux desiderata de Monsieur et Madame. De votre côté, vous priez pour que Monsieur et Madame Franchouillard ne vous entendent pas parler Français, vous marquez des points auprès du serveur avec vos trois mots de langue locale (bonjour – s’il vous plaît – merci) et, à défaut de pouvoir vous exprimer dans la langue du serveur, vous adressez un regard plein de compassion à ce dernier – ce dernier semble vous avoir compris : grand soulagement, malgré votre nationalité, vous ne serez pas assimilés à Monsieur  et Madame Franchouillard.
Le week-end dernier, j’ai reçu le couple antagoniste de Monsieur et Madame Franchouillard : Canaillou et Canaillette. Partants dès qu’une occasion se présente, les Canailles me suivraient (je crois) dans n’importe quelle aventure. Ils n’avaient jamais mis les pieds en Allemagne, n’ont jamais étudié l’allemand, et pourtant, ils ont été des invités exemplaires !

Levés à 3h du matin pour éviter la circulation sur la route, Canaillou et Canaillette sont arrivés en fin de matinée chez moi. Affamés par tant de route et un petit déjeuner anticipé, ils ont fait honneur à leur premier repas en Allemagne : des spätzle aux lardons et aux oignons. La découverte culinaire faisait partie de leur wish-list de séjour, j’avais donc commencé en douceur en cuisinant un plat à la frontière entre la France et l’Allemagne.
Le ventre bien rempli, nous nous sommes ensuite mis en route pour les thermes. Les Canailles m’ont demandé si je n’étais pas lassée, à chaque fois que je recevais des invités, de répéter le même programme. Réponse doublement négative : j’essaie de varier les activités pour en inclure des inédites, et quand il s’agit de retourner aux thermes, je ne suis jamais malheureuse ! Succès total pour cette première activité – comme à chaque fois que j’y emmène du monde.
Pour le goûter post-thermes, mes invités ont choisi de découvrir le concept du Eiscafé, j’ai choisi d’en découvrir un nouveau. Pendant que nous dégustions nos belles compositions glacées, j’ai assuré un petit cours sur le pourboire, suivi d’un exercice d’application. Mes élèves ont obtenu un résultat très encourageant !

 

De retour chez moi, les Canailles ont pu enfin s’installer et se poser un peu depuis leur réveil matinal. Quand est venue l’heure de préparer le dîner, je leur ai fait découvrir un objet culinaire typiquement allemand : le Eierpicker. La découverte fut un succès – pour les oeufs également : seul un sur les dix a eu sa coquille brisée à la cuisson. Les Francfortois ont peut-être déjà deviné quel repas se préparait : de la Grüne Soße (une crème aux herbes), accompagnée d’oeufs donc, mais également de Knödel (des boulettes de semoule). Les puristes me pardonneront cette intrusion régionale voire nationale dans notre repas francfortois (les Knödel sont autrichiens et bavarois), mais le planning de dégustations sur le week-end nécessitait quelques arrangements. Je suis restée en revanche bien régionale pour la boisson, puisque nous avons ouvert une bouteille d’Apfelwein (du vin de pomme). Je ne comprends toujours pas cette boisson, trop acide à mon goût, mais cela faisait partie de la découverte culinaire.

Le lendemain matin, pendant que les Canailles dormaient à poings fermés, je suis sortie de ma chambre sur la pointe des pieds pour une mission apparemment anodine : chercher quelques Brötchen (petits pains) pour le petit déjeuner. En parfaite Française, je pensais que, même un dimanche matin, je trouverais aisément une boulangerie ouverte. Eh bien non ! Il m’a bien fallu trois quarts d’heure pour revenir avec le petit déjeuner. Heureusement, le pain était délicieux ! Le petit déjeuner aussitôt englouti, nous sommes restés dans la cuisine pour préparer le pique-nique de la journée – pique-nique aux couleurs allemandes bien sûr, avec des sandwichs au salami. Pour la blague, c’était un salami pure Pute (pur dinde – qu’avez-vous cru ?).
Direction ensuite la gare, car, pour voyager comme de véritables allemands, mes Français du week-end ont préféré le train à la voiture. Cela fut l’occasion d’utiliser un Schönes-Wochenende-Ticket, un billet de train groupé qui permet de voyager de manière illimitée une journée en week-end sur le réseau ferré allemand (à l’exclusion des ICE tout de même). Pour trois personnes, le billet a coûté 48€. Un soleil radieux a accompagné notre petit voyage campagnard, et enfin, notre destination a été atteinte : le Dornröschenschloß (château de la Belle au bois dormant). Je vous l’avais déjà dit : les frères Grimm sont omniprésents dans la région !

 

Le château se visite rapidement, mais n’oubliez pas de prendre un petit livre à l’accueil pour vous arrêter aux étapes-phares du célèbre conte. Autres étapes incontournables lors de votre visite : le Glückcent (pièce de 1 cent censée porte-bonheur), également remis à l’accueil, que vous pouvez jeter dans la fontaine en formulant un voeu ; pour finir la visite, une photo devant le plus grand cadenas de l’amour au monde, avec, à la clé, une participation à un concours désignant chaque mois un couple gagnant… Les Canailles ont d’ailleurs participé à ce concours en simulant une pose de demande en mariage (désolée pour ceux qui ont vu la photo, ça n’était pas une véritable demande !).

 

En attendant le bus retour, nous nous sommes promenés dans les environs du château. Nous sommes passés devant le Tierpark de Sababurg, également très réputé dans la région. Puis nous nous sommes aventurés dans les bois, et arrêtés à une cabane d’observation des oiseaux d’où nous avons surtout vu le château.

 

De retour à Kassel, nous nous sommes arrêtés dans un café du centre-ville pour prendre le goûter avec une de mes collègues francfortoises, en visite pour deux jours avec son mari et leurs deux enfants. C’est donc la troisième collègue francfortoise que j’ai l’occasion de retrouver chez moi, cette fois-ci fut la plus courte rencontre, mais le moment fut tout de même très convivial !
Après un court répit chez moi, les Canailles et moi-même étions à nouveau de sortie : d’abord dans un restaurant pour faire découvrir à mes invités le Schnitzel (escalope panée), ensuite dans un bar que je découvrais moi aussi, mais pour lequel je ne prenais pas trop de risque étant donné tous les bons échos que j’en avais eu. Et nous n’avons effectivement pas été déçus !

 

Pour le dernier jour de séjour (ou plus exactement, la dernière matinée), j’avais prévu un brunch à l’une de mes adresses préférées. Encore une fois, ce fut un prétexte pour faire découvrir aux Canailles le petit déjeuner à l’allemande : charcuterie, fromage et Brötchen. Et puis le restaurant se trouvait sur le chemin pour rendre visite à Herkules, toutes les excuses étaient réunies pour s’y arrêter ! J’ai cru cependant que nous n’y arriverions jamais : les tramways faisaient grève et ne s’arrêtaient ni à mon arrêt habituel, ni aux quelques arrêts suivants. Je n’aurais pas dû répondre aussi vite par la négative à Canaillette lorsque cette dernière m’a demandé : « Est-ce que les Allemands font des manifestations pour le 1er mai ? ». Au lieu d’affirmer catégoriquement qu’un Allemand ne faisait jamais grève (quelle idée !), j’aurais dû répondre qu’au moins, les transports français savaient mieux faire grève que leurs homologues allemands. Cette déconvenue a néanmoins vite été balayée, et nous avons rattrapé notre programme de la matinée.

 

C’était bien le seul petit nuage du séjour ! Pour le reste, beau fixe constant, merci les Canailles pour cet agréable week-end, et ravie d’avoir aidé l’Allemagne à vous conquérir 🙂

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